Depuis la nouvelle réglementation de 2022, l’alimentation des poules pondeuses biologiques s’est complexifiée. Pour offrir des alternatives à ses adhérents en cas de baisse de la consommation, Le Gouessant mène des essais en élevage sur le mouillage de l’aliment.
Passages viraux, coups de chaleur, démarrage de lots… Les facteurs pouvant induire une baisse de la consommation chez les volailles ne manquent pas et ont un impact sur la ponte. En élevage bio, la problématique est d’autant plus importante que le cahier des charges est plus restrictif depuis 2022 : « dans l’aliment, nous sommes passés de 95 % de composition bio à 100 %, ce qui implique davantage de contraintes au niveau de la formulation et fabrication de l’alimentation biologique de nos poules », explique Frédéric Trécherel, technicien référent pondeuse chez Le Gouessant. Cependant, il existe une alternative : le mouillage des aliments. Pour évaluer l’impact concret de cette pratique sur la consommation en élevage de poules pondeuses bio, Le Gouessant a lancé des essais chez deux éleveurs partenaires. « Je suis satisfait des résultats issus du premier lot testé », indique Jean-Michel Bouedec, éleveur à Gourin (56). « J’ai deux bâtiments et j’ai constaté que dans celui où nous avons réalisé le mouillage, la consommation était supérieure d’environ 5 à 6 g par volaille. » D’après les études menées par le pôle R&D de la Coopérative, 5 grammes de consommation en moins suite à une période critique équivalent entre 1 et 4 % de ponte en moins. Cependant, le mouillage doit rester une alternative lors d’une baisse de consommation. « Il ne faut pas donner l’habitude aux volailles de consommer un aliment humide. Le risque est de perdre un levier en cas de problème », recommande Frédéric.
Élaborer une installation efficace
Dans un premier temps, ces essais visent à vérifier si le mouillage des aliments impacte la consommation des poules pondeuses, puis à mesurer les quantités supplémentaires ingérées. Les deux éleveurs testent ensuite l’intérêt d’un mouillage en continu. Enfin, ils cherchent quand et comment le réaliser. Pour mener cette expérience à bien, il faut installer un système qui répond aux exigences des bâtiments et aux méthodes de travail des exploitations. Le premier éleveur de l’essai s’est orienté vers un système avec un compresseur d’air : il projette de l’air et de l’eau dans le circuit d’alimentation. Quant à lui, Jean-Michel a choisi un système basse pression à l’aide de buses qui aspergent les aliments. Les premiers tests ont été menés avec des buses de brumisation, mais le mouillage était trop superficiel et jugé insuffisant. L’éleveur a alors installé des buses de pulvérisateur : une, puis deux, puis trois le long du circuit d’alimentation. L’investissement est de 2 560 € HT, « mais un agriculteur bricoleur peut construire ce système à moindre coût », juge l’éleveur. Désormais, il a la possibilité de moduler l’humidité de l’aliment en fonction des différents lots. « Il y a un gros travail d’observation pour adapter la quantité d’eau. J’ai choisi trois descentes, mais je peux également m’adapter à chacun de mes lots », souligne Jean-Michel.
40 ml d’eau / poule / jour
Une fois l’installation prête, l’éleveur réalise un premier essai sur un demi circuit afin d’observer le comportement des volailles. Le résultat est sans appel : « les poules se déplacent pour aller vers l’aliment humide, c’est très impressionnant à observer », témoigne l’éleveur. L’étape suivante vise à mouiller l’alimentation dans deux salles sur quatre au sein du même bâtiment. L’éleveur constate une différence de consommation : les volailles mangent davantage l’aliment humide. L’ensemble du circuit est ensuite mouillé lors de trois repas sur les quatre. À la fin du lot, seuls deux repas sont mouillés, car l’éleveur ne juge plus utile de pousser davantage la consommation. À chaque repas, 40 litres d’eau sont injectés dans le circuit, soit 40 ml par poule et par repas. « À ma grande surprise, la consommation d’eau des poules n’est pas impactée par ce mouillage, elles consomment toujours la même quantité au quotidien. En revanche, j’ai noté des fientes plus humides », détaille Jean-Michel.
Chiffrer l’impact sur la consommation
Un nouveau lot est arrivé au mois d’octobre au sein de l’exploitation : l’essai sera reproduit si l’éleveur note une baisse de consommation ou une croissance trop faible. Il a également installé le système de mouillage au sein du deuxième bâtiment. L’objectif consiste à aller plus loin dans l’essai, en quantifiant ses observations pour connaître l’impact chiffré du mouillage. Ensuite, l’éleveur cherchera la meilleure manière d’organiser ce mouillage : combien de repas mouillés, à quel moment de la journée, avec quelle régularité ? Autant de questions qui annoncent un projet passionnant. Les résultats seront présentés aux éleveurs de la Coopérative et Jean-Michel est ouvert à partager son expérience afin de voir de nouveaux éleveurs participer à cet essai. « J’aime trouver des solutions pour améliorer notre travail d’éleveur et nos résultats. Nous avons tous besoin les uns et des autres pour faire progresser nos élevages », conclut-il.